Friday, April 19, 2024
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Gabon: la Constitution modifiée pour pallier l’absence du président malade

La Cour constitutionnelle du Gabon a modifié la Constitution pour pallier l’absence du président Ali Bongo Ondimba, hospitalisé depuis trois semaines à Ryad, une décision dénoncée jeudi avec véhémence par l’opposition et la société civile qui parlent de “coup de force”.

Tard mercredi soir, Marie-Madeleine Mborantsuo, présidente de la Cour constitutionnelle depuis 1991, a convoqué la presse pour lui faire part de la décision de la Cour de modifier la loi fondamentale afin de faire face à “l’indisponibilité temporaire” du président Bongo.

Ce dernier est hospitalisé depuis le 24 octobre en Arabie saoudite où, selon la présidence à Libreville, il se trouve “dans une phase de recouvrement de la plénitude de ses facultés physiques” à la suite d’un “malaise”, de “vertiges” et d’un “saignement”.

Aucune précision n’a été donnée sur le mal dont souffre Ali Bongo, 59 ans, ni sur la date de son éventuel retour au Gabon.

La Constitution actuelle ne prévoyant pas le cas d’empêchement temporaire du chef de l’Etat, selon la Cour, elle a donc décidé après avoir été saisie par le Premier ministre Emmanuel Issoze Ngondet, d’y ajouter un alinéa.

“En cas d’indisponibilité temporaire du président (…) certaines fonctions (…) peuvent être exercées, selon le cas, soit par le vice-président de la République, soit par le Premier ministre, sur autorisation spéciale de la Cour constitutionnelle”, indique-t-il.

Dans un premier temps, la Cour a autorisé le vice-président, Pierre-Claver Maganga Moussavou, “à convoquer et à présider un Conseil des ministres qui portera exclusivement sur l’ordre du jour joint à la requête du Premier ministre”.

Aucun Conseil des ministres ne s’est tenu depuis l’absence du président Bongo.

Avant d’être modifiée par la Cour, la Constitution stipulait que seul le président pouvait autoriser son vice-président à organiser un Conseil des ministres.

En cas de vacance définitive du pouvoir, qui n’a pas été constatée par la Cour, le président du Sénat doit assurer l’intérim jusqu’à l’organisation d’une élection présidentielle dans un délai maximum de 60 jours.

– “Desseins inavoués” –

L’opposition et la société civile ont dénoncé “un coup de force” et “un coup d’Etat constitutionnel” opérés par Mme Mborantsuo, pilier du régime des Bongo, d’abord du père, Omar, qui a dirigé le pays de 1967 à 2009, puis du fils Ali qui lui a succédé. La présidente de la Cour a eu deux enfants avec Omar Bongo.

Selon la Coalition pour la nouvelle République (CNR), formée pour soutenir Jean Ping, rival malheureux d’Ali Bongo à la présidentielle de 2016, “l’acte (de la Cour) prouve une fois de plus, une fois de trop, la violation flagrante de notre loi fondamentale, par la Cour constitutionnelle garante de celle-ci”.

Dans un communiqué, la CNR “s’interroge sur les desseins inavoués de la Cour Constitutionnelle”.

Pour Zacharie Myboto, président de l’Union nationale (UN), l’un des principaux partis d’opposition, il suffisait d’appliquer la Constitution de manière “régulière, normale”. Il estime que “la vacance du pouvoir” y est prévue “pour quelle cause que ce soit, y compris l’indisponibilité temporaire”. Lorsque la vacance est constatée, “c’est le président du Sénat qui assure la pouvoir”.

“Cette dame (Mme Mborantsuo) ne peut piétiner ainsi notre Constitution et brader la souveraineté du peuple gabonais, je crains le pire pour mon pays”, s’est indigné Jean-Christophe Owono Nguema, sénateur de l’opposition.

Marc Ona, l’un des principaux acteurs de la société civile gabonaise a affirmé que Mme “Mborantsuo n’est plus dans la logique institutionnelle, mais dans une logique de confiscation du pouvoir coûte que coûte”.

Télésphore Ondo, constitutionnaliste à Libreville, estime cependant que la Cour a un “pouvoir d’interprétation” et de “régulation des institutions” et est donc dans son droit en modifiant la loi fondamentale.

Cette décision a selon lui pour but de “sortir des turbulences institutionnelles” et la Cour constitutionnelle, face “à une lacune et un doute”, a dû agir “dans l’urgence”.

Wilson-André Ndombet, politologue proche de l’opposition à l’Université Omar Bongo (UOB), reconnaît également qu’il y avait “une situation de blocage des institutions, c’était un chaos constitutionnel”.

Mais il ajoute que la décision de la Cour “maintient les gens dans un flou institutionnel qui permet aux acteurs politiques au sommet de l’Etat d’utiliser la situation en leur faveur”.

“Quand la Cour constitutionnelle va valider les résultats des législatives” d’octobre, remportées par le parti au pouvoir, “qui va pouvoir nommer le nouveau gouvernement si le président de la République n’est pas là?”, interroge-t-il.

Afp

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